Chères lectrices, chers lecteurs,
En tant que bon professionnel, tous domaines confondus, il me parait
toujours très important de faire l’expérience de toutes les problématiques qu’on
peut être amené à rencontrer tout au long de sa pratique. Car, bien sûr, il me
paraitrait incorrect pour notre client de traiter choses dont nous n’avons pas
l’expérience, choses dont nous n’avons pas idée, choses que nous n’avons pas
imaginées, choses que nous n’avons pas pensées.
Il faut savoir pour ce faire, qu’en tant que psychologues, nous commerçons
principalement dans le domaine très large de la souffrance. Ainsi, il est souvent question de stress, d’angoisse,
de dépression, etc.
Donc, sans nécessairement faire l’expérience de l’effondrement
psychique anéantissant mélancolique, j’ai, au décours de situations
personnelles diverses, eu la chance de me voir offrir, imposer, quelques
échantillons de souffrance en édition limitée.
Et pour être entièrement honnête avec vous, je n’ai pas grandement
apprécié le produit. Effectivement, à la première utilisation, j’ai ressenti
comme une sorte d’irritation insupportable. J’en ai conclu comme une sorte d’allergie
à la douleur. Puis, ayant le goût du risque, j’ai tout de même re-subi le
traitement, une fois, deux fois, trois fois, etc., histoire d’enfin bénéficier
des avantages connus, oui car sur la notice, après l’avoir lu et relu, il y a
bien marqué « Ne tue pas (toujours) et rend (parfois) plus fort ».
Figurez-vous que ma dernière prise de souffrance remonte à pas plus
loin que… avant-hier ! Bah oui, suite à une déception personnelle, qui a
par la même occasion balayer le peu d’estime de moi-même qu’il me restait pour
l’année, je me suis fait une cure d’échantillons de souffrance l’espace de
quelques heures. Je vous raconte pas les symptômes indésirables : tristesse,
détresse, et autre stress. J’ai aussi fait un malaise, je me suis réveillée
dans le fond d’un puits et je me suis mise à faire un délire à thème contre-mégalomaniaque
: je me voyais dans 6 mois, inscrite au pôle emploi, à travailler au Mac Do
tout en étant persuadée que je trouverais jamais de boulot.
Bref, 48h plus tard, les effets de l’échantillon commencent à se
dissiper et je reprends peu à peu conscience. Cependant, je ressens encore
comme une petite déprime, un cœur qui flanche, une tête qui tourne, mais j’espère bien ressentir l’effet secondaire de la prise de force, comme promis dans la
pub. On m’a dit que ça mettait un peu de temps à venir, alors j’attends et agis
de sorte que ça vienne : je passe du bon temps, je positive, je trouve des
alternatives… Et peut-être qu’après tout ça, je pourrais enfin trouver la force d’aller
retoucher les étoiles.
Pour conclure, je dois vous mettre en garde, Messieurs, Mesdames, les
échantillons de souffrance se prennent avec vigilance, surtout quand on est
intolérant à la douleur, comme moi. Petit à petit, je commence à comprendre la détresse de ceux qui ont pris la vraie dose et qui n’ont pas pu bénéficier des avantages de
la chose. (Oui, on dirait que je fais de la prose). Et je finis par me dire,
que malgré tout, se préparer à aider des gens qui n’ont pas pu se relever, c’est
un bien joli métier.
Sur ces belles paroles, je m'en vais positiver.
Mademoiselle Freud